Le déplacement des plaques lithosphériques entraîne des déformations de l'écorce terrestre avec l'apparition de structures caractéristiques; leur étude dans une région donnée permet l'établissement d'une chronologie des différentes phases tectoniques responsables.
Dans la croûte terrestre les déformations croissent avec la profondeur c'est à dire avec la température et la pression ; elles dépendent aussi de la pression des fluides circulants comme l'eau et de la compétence des roches (= aptitude à se déformer). Les déformations les plus fréquentes sont les plis et les failles.
Pli convexe vers le haut, au cœur duquel on
trouve les couches les plus anciennes.
La déformation de strates est due à des
contraintes de compression.
Mattauer (1973) distingue 3 niveaux structuraux en
fonction de la profondeur correspondant à des types de déformation
différents:
Quand la profondeur augmente la température croit et la
plasticité des roches aussi.
Sous l'effet de la pression croissante, les roches subissent des
déformations temporaires et réversibles grace à leur élasticité; puis
les déformations deviennent irréversibles et permanentes, et dépendent
de la compétence des matériaux. Si elle est élevée ils pourront donner
des plis à grand rayon de courbure (grès, calcaires)
ou des failles, alors que si ces matériaux sont
incompétents ils donneront des plis (marnes, argiles). Les plis sont des
déformations permanentes, ductiles de la roche alors que les failles
sont des déformations cassantes.
![]() Fig. 6. Pli
couché
Le plan axial est incliné. |
![]() Fig 7. Pli-faille |
Les plis peuvent être déversés ou couchés et
donner des chevauchements c'est à dire peuvent en
recouvrir d'autres selon un contact anormal faiblement incliné.
Ils peuvent donner des charriages (chevauchements de
grande amplitude). Les plis faillés (fig.7) dont le
flanc inverse a été laminé, étiré montrent des bancs ayant subi un
amincissement important qui peut se briser par cisaillement
(cf. Fig.4), glisser et se déplacer sur le plan de cassure dans le
sens de la contrainte de compression maximale.
Les températures et les pressions plus élevées sont
favorables au développement, par flexion et glissement
banc sur banc, de plis isopaques (Fig.8 et 9) ou
parallèles et de failles si les roches sont
compétentes.
Les plis isopaques sont
des plis dont les couches conservent une épaisseur constante.
Le plan axial du pli est vertical, perpendiculaire aux contraintes de
compression; les pendages des flancs sont symétriques. C'est le type du
pli droit.
Principalement sous l'effet des températures élevées, les roches subissent un écoulement lent et sous l'effet de contraintes des déformations plastiques, c'est à dire qu'elles se déforment sans se rompre donnant des plis semblables ou anisopaques.
1.3.1. Les plis.
![]() Fig.10. Plis anisopaques dans une amphibolite des Maures |
![]() Fig.11. Plis anisopaques |
Ce type de pli montre des bancs
dont l'épaisseur varie, suite à un aplatissemt et un glissement de
la matière. Ces plis apparaissent dans des roches incompétentes. |
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Fig.12 &13. Microplis dans les phyllades du Massif de Sicié |
L'interprétation de la formation de ces microplis est
très difficile mais on peut affirmer qu'ils sont une illustration des
effets d'une tectonique polyphasée,
c'est à dire de la superposition de déformations tectoniques d'âges différents.
1.3.2. Objets structuraux
Dans le niveau structural inférieur des objets tectoniques
néoformés apparaissent foliation et schistosité
(cf. Fig.14,15,16).
Alors que la limite supérieure de ce niveau structural est la limite
supérieure de la schistosité, sa limite inférieure correspond à un
début de fusion ou anatexie des roches, en présence
d'eau qui donnera des migmatites.
![]() Fig.14. Antiforme dans les phyllades du Massif de Sicié Pli convexe vers le haut sans que l'on sache si les couches situées au centre sont plus vieille comme c'est le cas pour un anticlinal.
On distingue les surfaces de stratification S0 qui séparaient 2 couches sédimentaires et des surfaces de schistosité S1, (surfaces qui apparaîssent à la suite de contraintes ici latérales convergentes) le long desquelles la roche se débite en dalles. |
![]() Fig.15. Obsevation microscopique d'une lame mince de phyllade de Sicié (Photo P. Guardia) La schistosité est un litage visible au microscope
correspondant à une famille de surfaces S1
grossièrement parallèles apparues perpendiculairement aux
contraintes d'aplatissement d'origine tectonique.
Les surfaces S1sont soulignées par l'accumulation de résidus insolubles opaques lors de la dissolution et de la recristallisation des micas en micas blancs et chlorites (a). En (b) lits quartzeux à micas blancs recristallisés parallèlement à S1. |
La foliation: surr la photo on voit une alternance de lits de nature et de taille différentes (lits blancs quartzo-feldspathiques et lits sombres micacés). Au sein de ces lits, les cristaux ont pris une disposition préférentielle perpendiculaire à la direction de la contrainte principale.
L'ouverture
de l'océan Atlantique il y a 180 Millions d'années au Jurassique
inférieur suite à l'affrontement des plaques africaine et européenne
provoque la fragmentation de la croûte terrestre et
l'individualisation de quatre enembles stucturaux :
-un
socle rigide, induré qui constitue le substratum
du département
C'est le coulissage de
la plaque Ibérique par rapport à la plaque européenne (Fig.24)
qui est responsable des grands traits structuraux de la Provence
et des massifs de La Sainte Baume (1147 m), Sainte Victoire,
l'Etoile, la Nerthe ou des massifs nord-toulonnais. Les
mouvements orogéniques se sont succédés de l'Aptien à la fin de
l'Oligocéne (- 125 à - 23,5 Ma environ).
La
couverture a d'abord été plissée puis fracturée, s'est
décollée, s'est déplacée et a été le siége de
chevauchements spectaculaires.
La région toulonnaise qui se
trouve à la jonction de la Basse Provence calcaire et de la Basse
Provence cristalline, offre une grande variété de paysages
morphologiques et géologiques; ils ont été modelés par des
phénoménes tectoniques et les effets de l'érosion. Certains
secteurs particuliérement tourmentés ont posé, posent et poseront
encore des problémes aux géologues afin de déchiffrer leur
histoire.
Fig.18. Unités structurales
D'aprés
des documents du B.R.G.M simplifiés "Amis de la
presqu'île de Giens"
Fig.19. Stratigraphie et structure de la région toulonnaise
Sur un vieux socle qui affleure à
Six-Fours et dans les Maures, où
l'on a trouvé un repère chronologique, les graptolites du Fenouillet
datés de - 440 millions d'années.
Distinguons
avec P. Laville les unités structurales chevauchantes
suivantes (cf. Fig. 23) :
- une unité de tégument, l' Unité
de Saint-Mandrier-Saint Jean du Var (1)
du Permo-Trias inférieur. En place, elle apparaît à Saint-Mandrier
(grés rouges, arkoses et psammites) en fenètre anticlinale sous
les phyllades de Sicié, à La Seyne-sur-mer, au pied du Faron et du
Coudon ou dans le Massif de la Colle Noire.
- une autre unité, l'Unité
des couches de décollement du Trias
moyen et supérieur.
Les décollements socle-couverture se faisant grace à trois niveaux
d'évaporites du Trias (gypse), deux situés dans le Trias moyen, un
autre dans le Trias supérieur (Caron JP 1968). Ainsi la
partie basale du tégument formée de terrains permiens faillés et
de lambeaux de Trias inférieur, reposant en discordance sur le
socle, est restée solidaire de ce socle et a participé aux
mouvements qui l'affectent, alors que sa partie supérieure est
restée solidaire de la couverture sédimentaire.
Le Massif des Maures est constitué
de roches métamorphiques
intensément plissées et érodées (micaschistes, gneiss fins, gneiss
œillés, amphibolites et leptynites des Maures Occidentales, ou
encore, migmatites des Maures Orientales) ; il s'agit donc d'un
ensemble de formations rocheuses sédimentaires
ou magmatiques ayant subi plusieurs
cycles orogéniques successifs, anté-alpin, qui ont provoqué
des déformations ductiles et des métamorphismes associés.
Ce socle serait lui-même issu d'un vieux socle granitisé lors d'une
période de convergence (rapprochement) de plaques avec collision
(période cadomienne), comme semble le prouver le granite de
Barral considéré comme un granite d'anatexie crustale, daté
de -580 à -560 millions d'années.
Lors d'une période de distension s'étalant du Cambrien au
Silurien (-542 à - 417 Ma), se sont déposées sur ce vieux
massif, des formations sédimentaires détritiques marines de
type flysch, argilo-sableuses et pélitiques (débris fins), contenant
des Graptolites (Fenouillet prés d'Hyéres), datés de -440 millions
d'années.
C'est l'Orogénése hercynienne qui est responsable
de la formation des orthogneiss de Bormes-les-mimosas (issus du
granite du socle) et des phyllades, quartzites de Sicié
ou encore phyllades, micaschistes et paragneiss des Maures (issus de
la couverture sédimentaire paléozoïque).
Le Massif de Sicié est constitué
de phyllades et quarzophyllades antépermiens provenant d'une part de
pélites et d'argiles et d'autre part de grés quartzeux métamorphisés
en profondeur (cf. "niveaux structuraux" ci-dessus).
Au Carbonifére (-359 à
299 Ma) la chaîne hercynienne subit une érosion intense et
des formations détritiques charbonneuses à plantes
s'accumulent au Stéphanien dans de petits fossés intra-continentaux,
nord-sud, ouverts lors de coulissages tardifs (bassin de
Plan-de-la-Tour, du Reyran ou des Playes à Six-Fours).
C'est au Permien (- 299 à - 251 Ma) qu'un régime de
distension généralisée s'installe donnant naissance à des fossés
est-ouest où se déposent, sur des épaisseurs considérables (2000
métres au Luc), les débris provenant de l'arasement du massif
hercynien (dépôts discordants gréso-pélitiques continentaux) et où
se manifestent des remontées magmatiques (basaltes de Sicié,
Saint-Mandrier, La Colle Noire) ou des émissions de trachytes et
rhyolites intercalées (Saint-Mandrier, Estérel).
Au Trias inférieur la sédimentation détritique continue.
Ces terrains sont parfaitement visibles à Sanary (la Pointe
du Bau rouge) ; concordants sur le Permien, ils constituent la série
"des grés bigarrés".
Aprés un épisode lagunaire (dépôts de gypse et de calcaires), l'arrivée
de la mer alpine s'effectue au Muschelkalk (Trias moyen) avec
le dépôt de calcaires blancs fossiliféres à ammonites,
brachiopodes et lamellibranches.
Le dernier épisode (Trias supérieur) est laguno-lacustre (cargneules
et marnes bariolées à lentilles de gypse du Keuper).
Depuis la fin des temps triasiques (-200 millions d'années ou MA), on peut distinguer 6 épisodes dans leur histoire marquée par autant de phases tectoniques.
4.3.1. Du Jurassique au Crétacé inférieur (-200 à -125 MA) la future Provence est couverte par une mer peu profonde, chaude de type tropical ouverte vers l'Est : la Téthys. Bordée au Nord comme au Sud par un continent, elle va s'ouvrir à l'Ouest sur l'Atlantique dont l'ouverture progresse lentement vers le Nord. Les dépôts marins sont principalement des calcaires, des marnes, voire des argiles dans sa partie la plus profonde. Cette faible quantité de débris continentaux et grossiers témoigne du peu de vigueur du relief émergé. Provence et Languedoc vont se situer sur la marge méridionale de la plaque européenne tandis que Corse et Sardaigne sont dépendantes d'un fragment plus méridional : la plaque ibérique.Dans les dépôts méridionaux de cette Téthys résiduelle, la présence
de plus en plus fréquente de débris de roches du socle primaire,
indique la vigueur des érosions continentales et méridionales. Aprés
chaque période d'émersion bauxitisante, la mer tente de reprendre sa
place, d'abord par formation de lagunes où se forme du lignite, puis
par édification de plate-forme côtiére où apparaissent des plateaux
récifaux à Rudistes, cantonnés dans des zones plus à
l'abri des apports détritiques comme à la Cadiére d'Azur et au Castellet.
Cette tendance à l'émersion a débuté dans les Pyrénées dés la base
du Crétacé inférieur (- 145 millions d'années). Cette instabilité se
traduit par un va et vient permanent de la mer Téthys avant son
refoulement vers l'Atlantique quasi complet au Campanien (- 80 MA).
4.3.3. De la toute
fin du Crétacé supérieur (-71 MA) à celle du Paléogéne
(- 38 MA), la Provence émerge et sa partie méridionale s'éléve
progressivement.
Du Languedoc à la Provence, cette lente élévation est aujourd'hui
interprétée (GUIEU et ROUSSEL 1988) comme un bombement de
la croûte terrestre (Fig.23 et 24), qui s'accompagne du
glissement des terrains les plus superficiels ou couverture, déposée
sur les argiles et gypses triasiques ou couche «savon»
car cette derniére forme le lubrifiant de la pile de roches, déposée
à l'aplomb du gypse pendant tout le Secondaire. D'abord sous forme
de plis et fractures qui évoluent en failles inverses puis en chevauchements,
les structures de ces chaînons répondent à la force gravitaire
engendrée par le bombement accompagné du basculement des blocs de
socle vers le Nord. In fine, le socle décoiffé de ses roches
sédimentaires s'écaille et du Massif de Sicié à Porquerolles des
paquets partent vers le Nord à la poursuite de cette couverture
chiffonnée formant prés de Toulon les collines de Saint Cyr et du
Beausset et les monts Faron, Caumes, Coudon, Croupatier et Gros
Cerveau, puis plus au Nord, les chaînes de la Sainte Baume, de
l'Etoile et de la Nerthe. L'édification de ces chaînons se termine
il y a 38 MA.
L'originalité tectonique de la Provence réside dans ce mode
d'apparition par distension et bombement de la croûte terrestre et
non par compression entre deux mégaplaques comme le suggéraient les
précédentes interprétations.
Guieu et Roussel proposent en 1988 que, sur la marge sud de la plaque européenne l'apparition d'un bombement crustal dont le versant sarde au SE serait plus élevé que le versant provençal au NE, conséquence d' une élévation de la croûte terrestre dés le Crétacé supérieur (100 Ma), serait à l'origine du décollement de la couverture sédimentaire et de son glissement gravitaire vers le Nord sur un socle basculé.
4.3.6. Aujourd'hui en Provence et depuis 2 millions d'années, la tectonique semble presque figée, excepté à l'aplomb des vieilles failles du socle primaire qui restent sensibles aux mouvements profonds de l'asthénosphére. Les séismes historiques au voisinage d'Aix en Provence et le long de la Durance en témoignent. Plus discrétement, la dissymétrie des versants Nord et Sud du Massif de Sicié, de la Presqu'île de Giens et de Porquerolles témoignent d'un basculement vers le Nord il y a environ 11 000 ans, indiquant les derniers soubresauts de la dérive corso-sarde. Enfin au Nord-ouest de la Provence, les fortes accumulations de gypse triasique montrent une tendance au diapirisme sous le simple poids des sédiments plus récents qui les surmontent. Ainsi, à l'Ouest de Courthezon, le Miocéne forme un dôme érodé dont le cœur héberge un lac salé.
Prés de Toulon, la tectonique quaternaire s'exprime dans les réseaux de fractures comme celles du plateau de Siou Blanc où elles conditionnent la circulation des eaux souterraines infiltrées dans les calcaires jurassiques et crétacés. Les résurgences du Ragas au Revest, celle de la Foux à Evenos et bien d'autres comme celle de Port-Miou prés de Cassis, montrent l'importance des communications entre niveaux stratigraphiques et unités structurales. Même profondes, ces ressources naturelles sont néanmoins vulnérables aux pollutions de la surface. Enfin, associées au réseau de fractures précédent, les oscillations de la mer provoquées par les glaciations engendrent une érosion qui façonne les canyons de nos massifs et étagent les alluvions. De la difficulté de voir dans le panorama les différents chevauchements.En effet, en Provence, il y a eu une inversion du relief, c'est ainsi que les zones topographiquement les plus hautes actuellement, les barres calcaires urgoniennes (Crétacé inférieur), correspondent aux structures tectoniques les plus basses (les unités inférieures chevauchées), alors que les unités chevauchantes sont dominées. C'est l'effet de l'érosion qui s'attaquant d'abord à l'écaille supérieure chevauchante, déblayent les terrains les plus tendres depuis les calcaires marneux du Crétacé supérieur jusqu'aux niveaux plus résistants du Jurassique ; ainsi l'écaille supérieure se trouve-t-elle dominée par l'écaille inférieure dont l'Urgonien résiste à l'érosion.
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